MARCHÉ DE L'ART
La France à la traîne de la croissance mondiale ? C'est le
thème pris en août par Art Price pour son bilan mondial des sept
premiers mois du marché de l'art en 2005. En ne retenant que les "
Fine Arts " (peintures, sculptures, dessins, photographies, estampes, arts
plastiques), soit sans le mobilier et les antiquités qui font la force
de notre marché national, cet observateur classe la France à la
troisième place du marché mondial en chiffre d'affaires (en baisse
de 18 % par rapport à la même période en 2004) et à
la première place en nombre de lots (soit 34 250 uvres présentées
du 1erjanvier jusqu'au 18 juillet). Face à la concurrence internationale,
la France ne représente ainsi que 5,7 % du marché mondial (contre
7,7 % en 2004, et 7 % en 2000). Et de souligner que 50 % du chiffre d'affaires
français en " Fine Arts " ont été réalisés
entre le 1er juin et le 15 juillet .
Toujours selon Art Price, le chiffre d'affaires mondial pour ce premier
semestre 2005 est de 2,23 milliards de dollars, soit une hausse de 10,2 %. Cest
le marché anglais qui caracole en tête de cette croissance, avec
une progression de 19 %, soit 854 millions de dollars de produit de vente, contre
833 millions pour les États-Unis. Grâce au succès croissant
de ses ventes d'art impressionniste, moderne et contemporain de février
et de juin, le Royaume-Uni récolte ainsi 38,2 % de part de marché
avec 724 lots vendus au-dessus de 100 000 livres (contre 564 lots en 2004)...
Alors que les États-Unis affichent 686 lots au-delà de ce seuil
symbolique pour la même période, soit une progression de seulement
2,9 % (sans toutefois l'aide d'un Picasso à 104,16 mil-lions de dollars
avec frais comme en mai 2004 chez Sotheby's !). Ce boom du marché mondial
voit l'Italie passer en quatrième position, devant l'Allemagne, avec 76
millions de dollars de produit de vente.
Dans l'attente
du miracle français
Valérie DUPONCHELLE
On l'a vu en juillet, les chiffres sont heureusement beaucoup moins noirs
lorsque les Français les rétablissent en incluant dans leur calcul
les antiquités, le mobilier et les merveilles inclassables comme la garde-robe
de Mme Paul Poiret, le coup d'éclat de Piasa en mai qui a enchanté
Paris et les musées du monde entier (Le Figaro du 22 juillet). A
l'heure des rituels bilans du premier semestre 2005, Drouot et ses concurrents
se félicitent plutôt d'avoir résisté aux dures lois
de la compétition internationale, affichant même des résultats
encourageants : 230 M€ de produit art pour Drouot (soit + 15 % par rapport
au premier semestre 2004, + 5 % par rapport à 2003, l'année de la
triomphale vente André Breton), fier de maintenir contre vents et marées
sa part de marché sur l'échiquier parisien (360 M€ tous acteurs
confondus) ; 49,3 M€ pour Christie's France (soit + 7 % par rap- port à
2004, + 36 % par rap- port à 2002), de nouveau première maison de
ventes aux enchères en France. Loin devant Tajan SW, pourtant sous l'impulsion
volontaire de la financière américaine Rodica Seward (38,2 M€
de produit vendu grâce aux 4,8 M€ de Monaco en août, soit + 12
% par rapport à 2004). Devant " Artcurial Briest. Poulain Le Fur et
F. Tajan ", les quatre mousquetaires regroupés en l'Hôtel Dassault
(28,7 M€, soit + 20 % par rapport à 2004), maison toujours leader
en art moderne (8,226 M€, soit + 13 %) et contemporain (6,9 M€, soit
+ 20,5 %), comme en design (1,01 M€, + 27 %). Devant Sotheby's également,
un peu atone ou singulièrement élitiste selon les avis (21,5 M€
en 9 vaca-tions contre 20,6 M€ en 2004. mais " cinq fois plus à
l'exportation ", dont le Canaletto de Londres à 27,3 M€ !). Viennent
ensuite Piasa (20,19 M€ jusqu'au 30 juin 2005. contre 23,83 M€ au premier
semestre 2004) ; Pierre Bergé & Associés (14,76 M€, soit
+ 40 % !), Beaussant-Lefèvre (11,25 M€, soit + 19,6 % grâce
au Paysage d'hiver d'Avercamp vendu 759 500 € le 17 juin et aux faisans
de Vaux-le-Vicomte). Enfin, Claude Aguttes SAS à Neuilly a récolté
9,29 M€ en 38 ventes, précédant le triumvirat Cornette de Saint-Cyr
avec 8,27 M€ en 24 ventes (dont 5,489 M€ en art contemporain, mieux
que les 4,838 M€ du premier semestre 2004).
Droit de suite
Pourquoi Londres et pas Paris ? " La grande faiblesse du marché
français reste le droit de suite, auquel s'ajoute la TVA à l'importation
un peu plus haute (+ 1 %) qu'en Grande-Bre-tagne ", rappelait en juillet
Philipp de Württemberg, PDG depuis 18 mois de Sotheby's France et "
Managing Director " de Sotheby's Allemagne. "Autres handicaps, la
loi des passeports exigés pour chaque objet et d'une valeur si basse qu'ils
freinent bien des transactions, et la règle savante des préemptions
qui continue d'étonner les acheteurs étrangers ", souligne
ce carté-sien qui a laissé le bureau de Londres vendre le Canaletto,
le Vlaminck fauve, le rare Cy Twombly (904 000 £ ) et le bureau de New York
le grand Baron Gérard (2,2 M 8 ), tous venus de France. " Le marché
français continue de se développer ", assure-t-il. Il mise
sur le mobilier français (40 % des objets d'art vendus ce premier semestre),
l'art tribal (40 % également des objets vendus et beaucoup d'acheteurs
américains), ainsi que sur les domaines de tradition française comme
l'orfèvrerie et les livres. Il parie aussi sur les Français, qui
ont représenté 30 % des acheteurs en lots et en valeur au premier
semestre chez Sotheby's. Le mobilier, comme les six fauteuils à la sirène
d'Eileen Gray (le plus cher a fait 1,744 M€, devenant le fau-teuil le plus
cher du monde), n'a pas été comptabilisé dans les "
Fine Arts " d'Art Price. Cela a pourtant permis à la SW Camard &
Associés de récolter 13,591 M€ en une seule vente d'arts décoratifs
du XXe le 1er juin, soit le produit de vente en France le plus élevé
depuis l'ouverture du marché français. .../...
Valérie DUPONCHELLE
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